Ce n'est pas du «Quebec bashing», mais un problème qui requiert une solution

  • article

L'incident de Mme Fatemeh Anvari, l'enseignante de Chelsea au Québec, a peut-être ravivé l'attention portée aux effets néfastes de la Loi 21 sur les individus et la société en général, mais ce n'est certainement pas la première personne dont la vie est affectée par cette loi depuis son adoption par la CAQ en 2019.

 La clause «grand-père» habilement incluse dans cette loi a protégé notre société contre des centaines, et probablement des milliers, d'incidents de ce type au cours des deux dernières années et demie, mais elle n'a pas protégé les individus de ses effets négatifs (incapacité de chercher un emploi, promotion, déménagement forcé hors de la province), pas plus qu'elle n'a protégé un très grand nombre de personnes appartenant à diverses communautés de se sentir comme des citoyens de seconde classe.

Les premières victimes de la Loi 21 ont été l'égalité, la dignité, la liberté de choix ainsi que les deux chartes des droits de la personne dont nous, Québécois et Canadiens, sommes très fiers.

 Répéter encore et encore que la Loi 21 est « équilibrée » n’y changera rien.  De plus, prouver qu'il n'y a pas de « racisme systémique » au Québec deviendra beaucoup plus difficile, ou pratiquement impossible, avec la Loi 21 dans notre Code civil.

L'attention internationale que le Québec a reçue depuis l'adoption de cette loi n'est pas le type d'attention que nous souhaitons.  Et on ne peut pas l'expliquer simplement en prétendant qu'il existe un sentiment d'hostilité à l'égard du Québec.  Pourquoi y aurait-il un tel sentiment dans des endroits où la plupart des gens ont à peine entendu parler du Québec dans leur vie ?

La loi 21 prétend être une solution à un problème, mais ce problème n'existe pas. Une société laïque, que nous convenons que le Québec est et devrait toujours être, ne devrait pas nier que ses citoyens ont diverses croyances et peuvent vivre librement selon celles-ci.  D'autre part, la Loi 21 crée des problèmes.  En plus de ceux mentionnés ci-dessus, il y a aussi le problème de la pénurie d'enseignants, qui est exacerbé par la Loi 21. 

Enfin, on peut se demander pourquoi nous sommes si inflexibles pour continuer à contester la Loi 21, maintenant qu'elle a été votée. Pourquoi ne pas simplement la respecter et rentrer dans le rang ?  La réponse est simple. Bien des lois injustes ont existé dans le monde et ont causé de graves dommages. Mais ne nous souvenons-nous pas de ceux qui les ont contestées jusqu'à ce qu'elles soient abrogées, plutôt que de ceux qui les ont adoptées?

La définition arbitraire de la « position d'autorité» est également déroutante.  Les ministres, les sous-ministres ou le Premier ministre n'occupent-ils pas des postes d'autorité?  Pourquoi ne sont-ils pas mentionnés dans la loi ?

Cela nous amène à une conclusion : cette Loi est basée sur des informations erronées, ou elle existe pour des raisons autres que celles déclarées publiquement.

Nous aimerions donc inviter M. Legault à passer un certain temps, quelques après-midi, avec des familles qui comptent dans leurs rangs des personnes portant le voile, la kippa ou le turban (qui ne sont pas des symboles mais des choix de vie) et à apprendre à les connaître un peu mieux.  Cela contribuera sûrement à faire du Québec une société bien meilleure que ne le fait la Loi 21.

 

Ehab Lotayef est un ancien président de la Semaine de découverte des musulmans

Samira Laouni est l'actuelle présidente de la Semaine de découverte des musulmans

 

photo : wikimediacommons/Avramescu Marius - Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 credit*